Les SCOP (Société Coopérative Ouvrière de Production) sont coordonnées par la CG SCOP et ont pour slogan : « La démocratie nous réussit ». C’est peu dire, car si les associations ouvrières sont nées dans la clandestinité vers le 19e siècle et qu’elles se développent à chaque soulèvement des travailleurs, elles ne sont, aujourd’hui, qu’un énième outil du capital servant à nous asservir. Une autre arène où l’avidité se montre en spectacle, où l’on se sert de ses propres compagnons pour atteindre des objectifs personnels.

Historique et fonctionnement :

La SCOP apparaît, de façon légale, en 1884 avec la Chambre consultative des associations ouvrières de production puis régit par la loi Ramadier sur les coopérations en 1947, elle voudrait être une alternative au patronat en permettant à des travailleurs ayant perdu leur emploi suite à la liquidation de leur entreprise, ou qui sont « fâchés » avec les hiérarchies, de pouvoir gérer, eux-mêmes leur outil de production et, ainsi leur activité économique. En effet, elle permet aux salariés de pouvoir participer à des assemblées générales afin de décider des stratégies à suivre pour la pérennité de l’entreprise, or… :« On trouvera toutefois des coopératives dans lesquelles le nombre des salariés-associés ne représente qu’un faible pourcentage de celui des simples salariés – qui ne sont qu’éventuellement consultés. Le passage de l’état de salarié à salarié-associé pouvant être soumis à des conditions – par exemple un certain niveau de salaire dégagé – ou même à la cooptation, on peut constater dans certains cas un fonctionnement plus oligarchique que démocratique, avec un statu quo maintenu par les mêmes personnes. La durée moyenne d’exercice d’un dirigeant de Scop est d’une vingtaine d’années ».On m’aurait menti ?

De la théorie à la pratique, le fossé :

Car, oui, je l’ai fait ! J’ai travaillé dans une SCOP. Mais ça avait tout à fait d’être une entreprise au profit d’un seul. On m’a tout simplement vendu, que c’était un projet visant à sortir du rapport classique entre salarié/patron, où on était tous copains et où les efforts se feraient dans la fraternité sur fond de culture non-commerciale (on n’écoutait pas les radios de masse mais des musiques subversives en me faisant comprendre que je n’aurais pas cette chance là dans une boite ordinaire !). Je dois l’avouer, les premières semaines ont été plutôt excitantes. L’ambiance était loin d’être désagréable et le travail intéressant. Mais, très vite, le rideau s’est levé sur le personnage de cette SCOP, le plus redouté, j’ai nommé LE GERANT.

Petite précision : « Comme toutes les entreprises, les Scop ont une organisation et une direction ». Un gérant est donc nommé pour une durée de 2 ans. Et c’est à ce moment que la confiance est soumise à rude épreuve. Voici une personne qui jouit maintenant du pouvoir de parler au nom des autres associés. Malheureusement, dans les SCOP, le mandatement contrôlé et révocable à tout moment n’existe pas (à ce moment là, je me suis senti extrêmement fier, non pas d’être salarié d’une SCOP, mais d’être anarcho-syndicaliste !). Rentrons dans les détails ; cet énergumène, paraissant des plus sympathiques et d’une énergie débordante s’est avéré être un patron des plus méprisants. Alors que nous étions censés être « potes » , j’étais devenu un « larbin » et les chamailleries enfantines se transformèrent en remarques désobligeantes. Heures supplémentaires non payées et non récupérées (sans compter le travail bénévole le week-end, pour rendre service), salaire de misère étaient de rigueur. Alors que lui se rémunérait 200 euros de plus sous prétexte d’un emploi du temps surchargé en démarches commerciales et études de marché. On l’aurait excusé si il y avait du boulot qui rentrait où si on ne devait pas faire le travail à sa place. C’était devenu clair ; on bossait pour que le gérant se la coule douce !!!

Un triste bilan :

Durant cette expérience, j’ai eu la chance de pouvoir rencontrer d’autres gérants dont un d’une SCOP de plus de 400 salariés…et j’ai eu envie de vomir. Management digne des plus grosses entreprises, arrogance et égocentrisme dans toute leur splendeur. D’autres gérants, qui sévissent dans de petites SCOP, sont marqués par la fatigue de devoir effectuer, en plus de leurs travaux, les multiples démarches administratives dont celles traitant des charges salariales (beaucoup finissent par dénoncer ces charges dont ils sont eux-mêmes bénéficiaires). Enfin un tel rythme de vie fini forcément par engendrer la dépréciation de tout ce qui existe en dehors de l’entreprise ; vie familiale, loisirs et culture…Incompréhension de la volonté d’émancipation de l’individu, en bref, le capitalisme. Il n’y avait plus rien d’humain, plus une lueur d’espoir de s’échapper de cette machine infernal qui recherche le profit à tout prix. Je me souviens encore, lors d’un premier Mai, d’un compagnon, essayant de nous démontrer les enjeux de l’organisation en SCOP pour éviter de tomber dans la résignation du salariat. Ce compagnon a fini par arrêter. Et je me souviens aussi d’un ami, sympathisant des idées libertaires qui m’assurait qu’on avait plus de liberté dans une SARL (il a un statut d’associé) que dans une SCOP !

Alors, comme je n’ai pas encore trouvé mieux que l’organisation au sein de la CNT-AIT (point de vue personnel) pour défendre l’émancipation de tous et que j’ai toujours besoin de manger et de dormir sous un toit, je n’ai pas le prolongement de mon contrat malgré une augmentation de 100 euros. Non, quitte à être traité comme un larbin pour engraisser un voleur, je suis retourné faire le tour des boites de contorsionnistes (intérims) pour gagner un salaire, qui même s’il ne vaut pas la peine, me permet de survivre tout simplement. Je suis un travailleur qui n’accepte pas n’importe quoi et j’en suis fier !!!

Benjamin, adhérent du SI72, CNT-AIT.

source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Soci%C3%A9t%C3%A9_coop%C3%A9rative_et_participative